Monday, December 04, 2006

Le néerlandais et le français :
soeurs de sang et de verbe





zoom sur la Meuse au Brabant
L'adoption franche et massive des mots maritimes et navals néerlandais par la langue française à l'époque de Descartes suscite l'étonnement. Cet enthousiasme langagière, bel exemple de rencontre de deux langues se fécondant et s'enrichissant, mérite à elle seule une série d'études ...et à coup sûr remplirait une étagère complète de toute bonne bibliothèque, une fois la question élucidée dans tous ses aspects politiques, culturels et économiques. Car perfection du langage naval et maritime = maîtrise des mers = mondialisation = richesses = honneur, gloire & grandeur.
Un siècle après l'assaut batave des océans, après les Portugais, les Espagnols et les Britanniques, les Français à leur tour, grâce au vocabulaire maritime hollandais assimilé, entrent dans le grand jeu planétaire, et ce sont les merveilleux voyages de La Pérouse et de Bougainville.
Cependant bien plus essentiel, et ceci explique probablement cela, en remontant dans le temps, au troisième siècle après J.-C., on s'aperçoit que le néerlandais et le français * naissent tous deux et en même temps dans la langue franque, parlée alors dans ces contrées que sont le Brabant et le Limbourg belge & néerlandais d'aujourd'hui. Une région bordée par l'Escaut à l'ouest, par le Main et le Rhin dans son cours inférieur à l'est et traversée par la Meuse au centre, d'immenses étendues de marécages et de landes couvertes de bruyères, habitées par le peuple des Francs, un collectif de tribus tudesques de la région de Francfort sur le Main, dont les Sicambres.
zoom
La Meuse à Maastricht

Ils ont été admis sur ce territoire au deuxième siècle sur autorisation spéciale de l'empereur romain lui-même. Ces guerriers (mot franc) n'hésitent pas à descendre leurs puissants fleuves, à longer les côtes de la mer du Nord et à s'aventurer jusqu'aux plages normandes et britonniques où ils sèment terreur & épouvante parmi la population, bien avant les Normands. En langue franque, franc signifie courageux, intrépide, audacieux, libre, combatif. Valeurs qui pour eux sont les seules qui comptent. Ils se nomment Childeric et Clotaire, Bernard et Hildegarde, ils prononcent exactement comme nous aujourd'hui les phonèmes blanc, bleu (couleur préférée des Français), banc, blond, haut, bise, bière, chance.

En ces temps reculés leur pays s'appelle la Toxandrie. C'est une terre de tourbe et d'eau, livrée aux marées d'équinoxes et crues des fleuves, pays bas, souvent sous le niveau de la mer. La capitale des Francs est alors Tongres. On y dit déjà guelte (geld) pour bénéfice, boni, excédent des récettes sur les dépenses, prime, gratification, comme de nos jours.
Tong = langue en néerlandais..!


Au cinquième siècle l'esprit d'aventure à nouveau s'empare de ce peuple, et c'est le passage des Ardennes, la bataille gagnée contre les derniers représentants de l'empire romain, le vase de Soissons, la conversion de Clovis "le fier Sicambre" (cherchez la femme) au christianisme, l'onction du roi à Reims par l'apôtre des Francs saint Remy, l'arrivée par les airs du saint chrême, la théophanie de Saint Michel à Avranches sous forme de stier/taureau (mot franc), la si mystérieuse dynastie des Mérovingiens liée à la dynastie davidique de Judée, la guérison (mot franc) des écrouelles... Charlemagne... le royaume de Jérusalem... les Templiers... voilà la fusée France lancée !

Au cours de ces longs siècles reculés le franc est la langue exclusive parlée par la cour et la noblesse. "Ambassadeur", "blasonner", "de gueule", "sable", "haïr", "guèter" : autant de mots et de phonèmes prononcés aujourd'hui encore identiquement en néerlandais et en français comme au temps des Francs.
"Gerbe" (quel symbole !), "marque", "gris", "blocus" se disent et se prononcent toujours tels quels aux Pays-Bas et en France.
"Meuse" (Maas), "Rhin" (Rijn) et "bau" (balk) : Rimbaud et Rembrandt ne sont pas loin...
(Il reste environ 500 mots francs en français moderne.)
Pendant des siècles la langue franque va influencer la structure du gallo-romain, et la latinité, si conservatrice, va être obligée de se plier aux impulsions nordiques, de s'adapter à la façon de penser et de parler des jolies Frédégonde et preux Clodomir, des francs Dagobert et belles Ermelinde, des nobles Aldebert et gentes Fridhilde... Les langues, comme les fleuves, tournent elles aussi et méandrent.
Conclusion à laquelle il semble impossible d'échapper : une bonne part du français moderne part du delta batave...
Enfin pour finir, traduit pour les francophones, datant du temps des Francs, voici les plus anciens vers néerlandais connus :
"sauf moi et toi tous les oiseaux ont construit leur nid
qu'attendons-nous donc pour en faire un aussi ?"
N'y respire-t-on pas déjà tout le parfum et la saveur de la France ?
MN
zoom sur Tonnerre Volant et Petit Trésor
* pour la part germanique

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